L’urbanisme contre la ville
Le Corbusier avait proposé de « supprimer la rue » (cf. La Zona [29]) par un programme où la vie serait définitivement partagée en îlots fermés et sociétés surveillées, signifiant ainsi « la fin des chances d’insurrection et de rencontre ». Emprunt à Thomas De Quincey de la dérive (le flâneur baudelairien/benjaminien, devenu simple voyeur dans le spectacle). Errance dans des « labyrinthes de ruelles » avec l’espoir de découverte de terres inconnues « dont je doutais qu’elles eussent été indiquées sur les cartes modernes de Londres » (Thomas De Quincey). « Ainsi les grandes villes de l’industrie ont transformé complètement nos paysages jusque dans la carte du Tendre » (perceptions, affects, émotions, cf. Jameson/Harvey) [30]. D’où la psycho-géographie. Le désert est monothéiste, la ville et le quartier inclinent plutôt à l’athéisme. Division patiente des villes en « zones de climats psychiques tranchés », en « quartiers états d’âme » : la recherche psycho-géographique est recherche des lois exactes et des effets précis du milieu géographique sur le comportement affectif des individus. « Aménagement de l’ambiance » ou encore la psycho-géographique comme « part du jeu dans l’urbanisme actuel », appréhension ludique du milieu urbain. Elle se place du point de vue du passage et repère les ambiances inhabitables (banlieues, déserts, zones de désolation). Projet subversif d’un urbanisme unitaire et de « chambres de rue », d’inclusion du temps de transport dans le temps de travail, et passage de la circulation comme supplément de travail à la circulation comme plaisir. Critique d’une architecture en fonction de l’existence actuelle « massive et parasitaire » et de la voiture individuelle [31]. L’urbanisme n’existe pas, si ce n’est comme idéologie, comme « technique de séparation » : villages vacances, grands ensembles, architecture nouvelle destinée aux pauvres ; « Autodestruction du milieu urbain ». Du droit au logement au droit à la ville (cf. Henri Lefebvre) : « éclatement des villes sur les campagnes recouvertes de masses informes de résidus urbains », supermarchés, parkings, terrains nus, désolation. La ville « tend à se consommer elle-même ».
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January 2017
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